Il s’agit
en cette origine commune, de la puissante force de “séduction” qui à la fois
“fascine”, et qu’exerce sur un groupe d’hommes selon une détermination
centripète les vouant à leur rassemblement unitaire, qui est en ce sens
mécaniquement “gravitationnelle”, ce qui notons le, signifie directement
qu’elle possède un caractère “grave”, la “convergence”.
Il s’agit
alors en celle-ci, non seulement de la détermination d’une pluralité
d’individus à un “projet commun”, ce qui est déjà la préoccupation du “civis”,
le “citoyen” tel qu’il se trouve associé en son projet, mais avec en plus une
projection de ce citoyen lui-même dans ce projet, projection par laquelle il
s’envisage alors dans un dépassement de lui-même…
Se faire
plus que soi, par un dépassement de soi-même et par le fait, plus que les
autres, afin d’en devenir “seigneur”, telle est la tentation…
Si beaucoup
demeurent convaincu, et curieusement, les fascistes font justement partie de
ceux-là, qu’une dimension supérieure de l’humain se trouverait dans la
“physique” des individus, en faisant que certaines races d’hommes seraient
supérieures aux autres, c’est pourtant bien, selon ce qui constitue chez eux
une compréhension intuitive du phénomène, dans une dynamique du groupe,
dépassant donc la singularité physique des individus et qui en ce sens est
“métaphysique”, qu’ils se tentent vers la supériorité.
En réalité,
c’est vraiment là et surtout uniquement là, et non pas dans la biologie,
mais dans la projection unitaire de sa
dimension collective, autrement dit selon une “convergence” des individus, que
se situe logiquement la dimension supérieure de l’homme.
C’est en
effet à partir d’elle qu’il est capable de s’établir dans un dépassement de sa
simple “nature”, par une “culture” qui résulte d’une exigence du groupe, et qui
s’en vient contraindre cette nature, soit en réprimant ses expressions
socialement négatives, ou tout au contraire en exploitant au-delà de leur
valeur naturelle, ses expressions socialement positives.
Ainsi, la
culture qui est la voie et la seule qui mène à la véritable dimension
supérieure de l’homme, est-elle corrélative à sa socialisation et à l’exigence
du groupe de sorte que l’homme supérieur est tout simplement l’homme
parfaitement socialisé, et il faut remarquer que les fascistes ont en ce sens
un comportement contradictoire à leur conviction, car s’ils étaient des hommes
supérieurs par nature, ce qu’ils se proclament volontiers, ils n’auraient point
besoin du groupe pour la mise en œuvre de leur supériorité…
Rappelons
maintenant que les individus qui sont des “personnes physiques”, et leurs
sociétés qui sont des “personnes morales”, ont besoin les uns et les autres
d’être “déterminés”, afin que s’établisse leur “être”, étant bien entendu que
l’indéterminé est précisément ce qui ne possède pas de réalité et dont pas
d’être. Or, cette détermination s’opère de ce que les êtres “sont”, à ce qu’ils
“font”, ce qui pour les individus et leurs sociétés, nécessite qu’ils soient
établis selon un “mythe fondateur” qui les justifie pleinement dans “ce qu’ils
sont”, d’où la préoccupation d’identité qui justifiera tous les sectarismes, et
un “mythe du progrès” le plus attractif possible, qui les justifie dans “ce
qu’ils font”, d’où la quête de supériorité…
Le
caractère mythique de ces deux éléments de leur détermination, tient au fait
que l’origine lointaine d’un peuple se perd bien sûr dans la nuit des temps, et
que sa finalité lointaine ne se trouve pas davantage définie…
Il est
manifeste qu’un groupe “exerce” sur ses membres selon un “effet de groupe”,
qu’il est facile d’identifier en observant la foule des supporters réunis sans
un stade. Ainsi, par la projection de son “unité” au-delà de la pluralité de
ses membres et par ceux-là mêmes, ceci, selon un discours identitaire et la
manifestation d’une volonté de puissance, un groupe déterminera d’autant plus
fortement ses membres à se constituer en lui. La séduction qu’il provoque alors
par cette attraction sur ses membres, tient au fait qu’en tant “qu’exercice”
sur ceux-là, au-delà de l’ordinaire, et selon l’implication “extractive” de ce
terme telle qu’elle se trouve signifiée par le préfixe “ex”, cet exercice
provoque leur “exaltation”, laquelle est une “expression” exceptionnelle de
l’être qui provoque une augmentation de son “intensité”, avec une “volupté” à
laquelle ces membres deviennent rapidement dépendants…
Le fascisme
exerce donc un peu à la façon d’une drogue, quand on se sent plus “plein” de
soi, plus certain de soi, mieux affirmé, quand on se sent “être” et vivre plus
intensément, parfaitement justifié dans son existence entre sa noble origine et
son exceptionnel combat, et quand on se sent graduellement devenir plus fort,
en compagnie de ceux du clan…
Notons
alors que toutes les religions et par le fait, toutes les civilisations,
puisque les secondes n’ont jamais manqué de s’établir autour des premières et
que leur base est culturelle, sont sous-tendues par cette attraction de
convergence, vers un “au-delà” de l’actuel et de l’ordinaire, qui est
“l’Au-delà” transcendant des religions, avec ses promesses de félicité, et
d’une façon plus terre à terre, les “lendemains qui chantent” des
civilisations.
Ceci pour
dire qu’à la fois les religions, et les sociétés humaines surtout
républicaines, qui se proposent de rassembler le plus de monde dans un projet
commun, la quête d’un mieux être à venir et l’accession à un état supérieur,
qu’il soit ici-bas ou dans l’au-delà, grâce à une unité d’action se développant
à partir d’une unité d’identification, emportent logiquement en elles-mêmes les
principes du fascisme, qui ne devient alors un problème que par l’ampleur
démesurée qui devient la sienne et notons le bien, “par réaction”, dans
certaines conditions.
C’est en
effet dans les sociétés désenchantées comme l’est actuellement la nôtre, qui ne
proposent plus aucun idéal de mieux être et de mieux devenir, ni pour l’ici-bas,
ni même pour l’au-delà, mais que la résignation à un ordre insatisfaisant des
choses, ce qui provoque fatalement selon un malaise indicible mais profond, une
destruction de l’intensité de “l’être” de leur citoyens, que les sirènes de
l’homme nouveau trouvent écho…
Issu du
“faisceau” de roseaux de l’Egypte ancienne qui était dit “Is”, et qui
signifiait la chose “sacrée” parce que “unifiée”, le faisceau des licteurs
romains constitué quant à lui précisément de “verges” qui servaient à punir les
contrevenants, rassemblées autour d’une hache pour carrément exécuter les plus
fautifs d’entre eux, symbolisait l’autorité de la république romaine que les
licteurs étaient justement chargé de faire respecter. C’est selon cette
signification que les révolutionnaires de 1789 l’ont repris comme symbole, pour
signifier que c’était désormais le peuple qui selon sa convergence
républicaine, était souverain…
C’est ce
qui explique qu’il demeure jusqu’à ce jour, le symbole de la présidence de la
république française et ceci, même si Mussolini qui était un grand admirateur
de la révolution française, qui considérait comme les révolutionnaires de 1789
que l’état devait être au-dessus de tout, et qu’on considérait alors à cause de
cela comme étant un homme de gauche, l’a d’autant plus facilement repris à son
compte qu’à l’origine ce symbole est romain, pour en faire l’emblème du parti
au “faiceau”, ce qui se dit “fascio” en italien et qui devint le parti
“fasciste”…
Retenons
donc que le fascisme est l’enchainement logique des sociétés désenchantées qui
portent atteinte à la plénitude de l’être de leurs citoyens, telles que la
nôtre, et à l’heure où certains s’emploient à nous enchainer dans la
résignation, préparons-nous à le voir poindre…
Paris, le 20 août 2017
Richard Pulvar