Parce
qu’ils ne veulent pas constater dans sa dure réalité, l’état de totale
dépendance, non pas seulement géopolitique telle qu’elle fait l’objet d’âpres
discussions, mais également économique, commerciale, financière, logistique et
technologique, dans laquelle leurs nations se trouvent vis-à-vis des puissances
du nord, et dans laquelle elles se mettent progressivement vis-à-vis des
puissances de l’est. Ceci, dans une situation qui n’offre aucune possibilité,
serait-ce au plus vaillant des chefs, de les en sortir, ni facilement, ni
rapidement, et surtout pas sans composer avec les forces adverses, comme
certains en quête d’une revanche historique spectaculaire, rêvent de le faire…
D’autre
part à cause d’une fierté mal placée et une surestimation publique et affichée
d’eux-mêmes, qui tente en réalité de masquer des doutes profonds, ils refusent
de considérer le plus simplement du monde que les aspirations matérialistes qui
sont les leurs, ne peuvent être satisfaites dans le monde qui est le nôtre
aujourd’hui, que selon le type de développement occidental que toutes les
autres nations de ce monde ont adopté et auquel elles ne renonceront pas pour
leur faire plaisir, et qu’il leur faudra fatalement sacrifier à ce type de
développement, serait-il celui de l’occident honni…
Ceci, étant
entendu que combien même il leur serait loisible malgré cette situation
mondiale, de faire le choix d’un tout autre type de développement plus proche
de leur sensibilité, qu’en toute logique il ne leur faudrait pas dès lors en
espérer les mêmes produits, autrement dit que renoncer à ce système, c’est
renoncer à l’aisance matérielle qui à justifié son développement selon une
détermination productiviste, et donc, renoncer à certaines aspirations et
exigences…
En
confondant une “potentialité” de richesse telle que les ressources qui se
trouvent sous leur pieds, et la “réalité” d’une richesse, lorsque celles-ci se
trouvent exploitées par ceux qui ont le savoir faire et l’initiative pour cela,
ils se sont convaincus qu’ils devraient normalement être riches même s’ils ne
sont pas en mesure d’exploiter ces ressources par eux-mêmes, et que s’ils ne le
sont pas, c’est parce qu’ils se font piller avec la complicité de chefs vendus
à l’ennemi…
Il est
temps d’en finir avec ces incohérences en considérant ici deux points…
Le premier,
c’est qu’il est temps de prendre conscience du fait qu’en réalité, il n’y a jamais réellement eu strictement
“indépendance” des nations africaines issues de l’empire colonial français. Il
n’y a eu en fait, “par anticipation”, compte tenu de la revendication d’égalité
des droits dont le refus par la métropole va conduire à la terrifiante guerre
d’indépendance de l’Algérie, qu’une délégation de pouvoir dans des nations
“factices” dont il était parfaitement clair qu’à l’heure où on leur concéda ces
indépendances, elles n’étaient tout simplement pas prêtes, et qu’elles ne le
seront donc jamais, prises qu’elles seront dans des épreuves innombrables, ce
qui va les condamner à une dépendance de fait et sans recours.
Ce
simulacre d’indépendance avait en réalité pour objet inavouable, tout d’abord
d’éloigner après l’alerte algérienne, les masses africaines qui par le jeu de
la démocratie et selon le principe de l’égalité des droits, auraient bien fini
par investir les lieux du véritable pouvoir qui sont demeuré depuis cette
époque, le palais de l’Elysée et le Quai d’Orsay.
D’autre
part, cette situation dégageait la métropole d’avoir a assurer sa charge pour
le développement et la mise en valeur des territoires, tout en lui réservant un
accès privilégié pour l’exploitation des ressources de la part de gouvernements
désireux de voir celles-ci promptement exploitées, afin de pouvoir assurer
leurs obligations…
Les
Africains qui en veulent tant à leur chefs d’état, manquent de comprendre que
la première marche d’un lointain parcours gouvernemental a été manquée dès le
départ, et que ces gens ayant hérité de cette situation, font ce qu’ils
peuvent, c’est-à-dire pas beaucoup…
Le deuxième
point important qu’il importe encore davantage aux Africains de bien en prendre
conscience, c’est que l’indépendance, telle qu’ils ont cru l’avoir où telle
qu’ils rêvent encore aujourd’hui de l’avoir, ils ne l’auront jamais, parce que
dans notre monde globalisé, cela n’existe plus et n’a même plus aucun sens…
Qu’il soit
bien entendu une bonne fois, qu’il n’existe absolument plus aucune nation
indépendante sur la surface de notre Terre, pas même le Vanuatu ou les Iles
Salomon, perdus dans le Pacifique, faisant face aux conséquences d’un
réchauffement climatique provoqué par d’autres, et dont le règlement ne peut
procéder que d’une concertation planétaire.
Il n’existe
plus sur cette Terre, que des nations totalement interdépendantes qui ont
absolument besoin les unes des autres, parce que les économies modernes ne
sauraient se satisfaire des ressources physiques ou intellectuelles propres à
chacune, ni des débouchés de leur seul marché intérieur, et toute la difficulté
pour chacune est de tenter d’obtenir le plus d’avantage possible de ses
relations forcées avec les autres…
Cette
notion de l’interdépendance totale des nations de ce monde ouvert et globalisé,
est celle qui est le plus fréquemment absente de la réflexion politique de
nombreux Africains qui, dans leur haine des occidentaux, rêvent de ne plus rien
avoir à faire avec eux et même de les envoyer carrément promener, sans parler
de tous les cinglés qui pensent pouvoir même les affronter, et qui partant de
là, s’insurgent de voir que leurs dirigeants ne le font pas. Ceci, parce que
leur manque total de contact avec la réalité des choses ne leur permet pas de
comprendre que c’est tout simplement impossible, et que cela n’a même plus de
sens…
En effet,
si les nations de l’occident, principalement la France, la Grande Bretagne et
les Etats-Unis d’Amérique, ont à ce point outrageusement dominé le monde grâce
à leurs puissantes armées, ils y a déjà quelques temps qu’elles se sont dotées
d’un instrument de domination encore plus redoutable, l’arme financière qui se
joue des frontières qu’elle franchi à la
vitesse de la lumière, ce qui ne permet à aucun pays de se mettre à l’abri
derrière celles-ci.
Envoyer
paitre les occidentaux, alors qu’ils ont déjà investi, outre la place
financière, tous les espaces économiques et commerciaux de leur nation, en plus
des espaces techniques et parfois même politiques, tel est le rêve fou de
certains Africains qui ne comprennent pas que tenter de se dégager de la
relation obligée, c’est se condamner à la subir…
En effet,
s’étant substitué à la livre sterling qui a assuré cette fonction jusqu’à la
deuxième guerre mondiale, le dollar américain est devenu corrélativement aux
accords de Brettons Woods qui l’établissait comme étalon équivalent à de l’or
(Gold exchange standard), de très loin la première monnaie de réserve du monde,
pour n’en céder un peu que depuis l’apparition de l’Euro…
A ce jour
le dollar représente encore 60% des réserves de change du monde entier, et
l’Euro environ 30% de celles-ci, de sorte que ces deux monnaies occidentales
représentent à elle seules près de 90% des réserves de change mondiales, ce qui
est totalement ahurissant, pour n’abandonner que quelques 6% pour le Yen, et
2,8% pour la livre sterling...!
Cette
situation traduit la domination financière elle aussi outrancière des
occidentaux sur le reste du monde, puisqu’ils sont les principaux investisseurs
partout dans ce monde, en Europe et aux Amériques bien sûr, mais également en
Afrique et en Asie et particulièrement il faut le noter, dans les cinq nations
du Brics y compris la Chine…
C’est ainsi
que si on peut se réjouir de constater que se trouvent en Afrique, dix des
vingt nations qui possèdent les taux de croissance les plus élevés au monde, il
ne faut pas manquer de remarquer que dans le même temps, au bout de dix années
d’une croissance exceptionnelle de ce continent, il ne participe pour autant
qu’a hauteur de 4,5% seulement de la production mondiale brute, qu’à 2% du
commerce mondial, et surtout, qu’à hauteur de 1% seulement des produits
manufacturés…
Il faut
alors bien comprendre que si ces chiffres flatteurs ont peu d’influence sur le
développement effectif du continent, puisqu’ils n’impliquent pas le
développement de tout un tissus industriel assurant en celui-ci la production
de produits manufacturés, c’est parce qu’ils traduisent en réalité l’activité
des entreprises occidentales qui exploitent les ressources brutes du continent,
ou d’entreprises africaines financées par des banques occidentales, et
l’activité des entreprises chinoises, 2500, implantées sur le continent pour
réaliser les équipements que financent les Chinois.
Ceci
signifie clairement que la forte croissance actuelle en Afrique est due à
l’activité d’entreprises occidentales ou chinoises, ou aux investissements
occidentaux dans l’économie africaine, et que par le fait ce sont les
Occidentaux et les Chinois qui en sont les premiers bénéficiaires, d’autant que
la classe moyenne africaine qui se développe malgré tout à cette occasion, est
condamnée à se procurer auprès d’eux les produits manufacturés qui ne sont
toujours pas produits en Afrique, et qui risquent de ne pas l’être avant
longtemps.
En effet,
en ne confondant pas les aides au développement que les Chinois accordent
d’autant plus généreusement aux nations africaines que ces aides sont “liées”
et que ce sont leurs entreprises qui réalisent les projets que ces aides
financent, avec ce qui serait de réels investissements dans des entreprises, il
est remarquable que les Chinois investissent peu en Afrique, et qu’ils sont de
ce point de vue à la quatrième place, derrière les Français qui sont les
premiers investisseurs, et comme par hasard, les Américains, et les Britanniques.
Il s’est
ainsi conclu tacitement un nouveau “Berlin” entre Occidentaux et Chinois pour
un partage économique cette fois, de l’Afrique, et selon lequel les
investissements avec l’exploitation des ressources africaines qui leur sont
liés, sont occidentaux, et les prêts publics d’état à état sont chinois, avec
toute la charge des travaux que cela implique. Ceci de telle sorte que, du fait
de la puissance financière des Occidentaux qui leur permet tout à la fois de
créer des entreprises, ou de prendre possession de celles qui existent même
s’ils ne les ont pas créées, les Africains n’auront jamais l’occasion de
développer eux-mêmes les entreprises leur permettant d’exploiter par eux-mêmes
leur ressources, et combien même y parviendraient-ils, que les prédateurs
financiers qui disposent d’énormes moyens, ne manqueraient pas de se les
approprier. D’autre part, du fait que les aides au développement que leur
apportent les Chinois, sont liées, ils n’auront pas davantage l’occasion de
développer les entreprises de réalisation de leurs propres équipements…
Il est
manifeste ainsi que pour autant que l’Afrique devient de plus en plus
productive, les Africains n’en sont guère pour autant plus riches, d’où le
sentiment qu’ils se font “piller” de leurs ressources, terme excessif et
inadapté dès lors qu’il s’agit d’entreprises qui exploitent ces ressources
selon des concessions qui leur sont accordées par les gouvernements.
Dans ces
conditions, celui qui semble avoir compris la marche à suivre pour faire face
au verrouillage que constitue le système financier, c’est ce monsieur Idriss
Deby Into. Car, au contraire de tous ceux qui clament qu’il faudrait sortir du
système CFA en claquant la porte, parce qu’ils pensent naïvement qu’il peut se
trouver hors de cette zone, un espace financier sur cette Terre, protégé par on
ne sait quoi, qui ne tomberait pas tôt ou tard et d’une façon ou d’une autre,
sous le contrôle des occidentaux, propose aux Africains de demeurer dans cette
zone, mais de la faire leur. Ceci, au moyen d’une banque africaine pour
héberger les comptes d’opérations et par une négociation avec la puissance
tutélaire qui s’annonce serrée, mais qui peut aboutir en faisant apparaitre un
avantage pour celle-ci, et étant entendu que l’épreuve de force dont rêvent
certains serait suicidaire…
Ce qui est
amusant à ce sujet, c’est de voir que les partisans de la méthode radicale qui
profitent confortablement des réseaux sociaux pour faire toute leur propagande,
manquent semble-t-il d’être informés du fait que le système complexe qu’ils
utilisent, qu’il s’agisse des deux câbles sous-marins, l’ACE ou le WACS, du
système satellitaire africain Rascom, ou de Eutelsat qui assure 50% du marché
africain, ou encore du réseau téléphonique, est entièrement placé sous le
contrôle d’un consortium d’entreprises sur lesquelles les états n’exercent
aucune autorité. Or, au sein de ce consortium, les puissants groupes
industriels et financiers de la puissance tutélaire qu’ils se voient affronter
s’ils parvenaient au pouvoir, tels que les sociétés Orange, Alcatel, ou encore
Thalès, s’y trouvent en position dominante. Ceci pour dire toute la fragilité
d’un pouvoir qu’ils pensent solidement posséder à l’aide de leur clavier…
Il y a
ainsi beaucoup d’Africains qui, n’ayant jamais constaté que nous étions dans un
monde globalisé, n’ont pas la moindre conscience de toutes les mesures de
rétorsion terribles, techniques, économiques, commerciales, financières, et
même alimentaires, dont disposent contre eux, ceux qu’ils envisagent
imprudemment d’affronter et qui pourraient par exemple priver des nations
entières de tout accès au web, et qui n’ont désormais plus besoin comme par le
passé de procéder à quelque intervention directe chez eux. Mais les chefs
d’état africains eux, sont placés pour le savoir, et comme leur objet n’est pas
de séduire les foules par des discours enflammés du haut de tribunes pour
recevoir des applaudissements, ils ne tentent pas de rouler des mécaniques, ils
savent que quant on n’est pas le plus fort, il faut être le plus talentueux sur
le tapis vert des négociations…
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